La Fondation Abbé Pierre, vient de remettre son 20e rapport sur le mal-logement au Président de la République et fait une nouvelle fois le constat édifiant du mal logement en France : 10 millions de personnes seraient en difficulté et le pays compterait 3,5 millions de mal-logés. Le mal logement renvoie directement à la question de la précarité énergétique, c’est à dire à celles et ceux qui ont du mal à se chauffer ou avoir de l’eau chaude dans leur logement.
Une personnes en précarité énergétique dans son logement l’est-elle aussi dans ses déplacements? Une étude du Commissariat général au développement durable (CGDD) met en perspective ces deux problématiques. Cette étude estime que 2,6% des ménages seraient en situation de précarité énergétique pour deux types de dépenses : les trajets et pour chauffer leurs logements. 22% le serait pour l’un ou l’autre de ces postes , soit 5,9 millions de ménages.
Pour le CGDD, «certains ménages se trouvent face à un choix difficile : renoncer à d’autres dépenses pour se chauffer correctement ou se déplacer ou, au contraire, se résigner à avoir froid ou à se déplacer moins. Dans cette étude, la notion de précarité énergétique est étendue aux déplacements en voiture pour aller au travail, faire des achats ou accéder à certains services.
En France, 2,7 millions de ménages (10,2 % des ménages) dépensent plus de 4,5 % de leurs revenus pour l’achat du carburant nécessaire à leurs déplacements contraints : le premier facteur de vulnérabilité pour les dépenses liées aux déplacements est l’éloignement des pôles urbains. Le risque de vulnérabilité énergétique imputable aux déplacements contraints est faible dans les pôles urbains (4,3 % pour les grands pôles, 6,9 % pour les moyens et petits), mais bien plus élevé dans les zones plus éloignées En ce qui concerne les couronnes, les taux sont de 18,8 % pour celles des grands pôles et de 16,2 % pour celles des pôles petits et moyens. Ce taux s’élève à 23,0 % dans les territoires multipolarisés et atteint même 31,0 % dans les zones hors aires urbaines » explique l’étude.
Les cinq régions les plus exposées seraient l’Auvergne (16,0 %), la Champagne-Ardenne (16,0 %), la Picardie (16,1 %), le Limousin 17,5 %) et surtout la Corse (28,0 %). Quatre régions présentent une vulnérabilité liée aux déplacements inférieure à 8 % : l’Île-de-France (3,0 %), le Nord-Pas-de-Calais (7,4 %), Provence-Alpes-Côte d’Azur (7,7 %) et l’Alsace (7,8 %).
Les différentes catégories de la population ne sont pas soumises de la même manière à cette précarité
Dans les grands pôles urbains, les ménages vulnérables pour les déplacements peuvent être, selon l’étude « des travailleurs, en particulier des ouvriers et des professions intermédiaires, ou au contraire des inactifs de moins de 30 ans, vraisemblablement étudiants ». Dans les couronnes de grands pôles, les ouvriers et les employés sont les catégories les plus vulnérables (respectivement 34,7 % et 29,9 %). Dans les petits pôles, les professions intermédiaires sont les plus exposées (13,4 %). En couronne des petits pôles, la consommation de carburant augmente très fortement, entraînant dans la vulnérabilité énergétique professions intermédiaires (23,4 %), employés (27,6 %), ouvriers (29,1 %) et agriculteurs (24,5 %). Dans les territoires multipolarisés, la proportion de travailleurs consacrant 4,5 % ou plus de leur revenu augmente nettement, qu’ils soient cadres (21,2 %) ou ouvriers (40,0 %). Enfin, selon le CGDD, ce phénomène est encore amplifié pour les ménages habitant hors des aires urbaines, en particulier chez les ouvriers (47,9 %) et les agriculteurs (51,2 %). Les retraités (17,2 %) et les inactifs (22,2 %) restent relativement épargnés, malgré un accès aux équipements moins aisé qu’en milieu urbain.
Voir ici l’étude complète.
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